" Face à un Eichmann réel, il fallait lutter par la force des armes et, au besoin, par les armes de la ruse. Face à un Eichmann de papier, il faut répondre par du papier. Nous sommes quelques-uns à l'avoir fait et nous le ferons encore. Ce faisant, nous ne nous plaçons pas sur le terrain où se situe notre ennemi. Nous ne le "discutons pas', nous démontons les mécanismes de ses mensonges et de ses faux, ce qui peut être méthodologiquement utile aux jeunes générations. "
Ces lignes, qu'écrivait en 1981 l'historien Pierre Vidal-Naquet, gardent toute leur actualité. Ceux qui, dans le sillage de Robert Faurisson, nient la réalité du génocide hitlérien n'ont pas désarmé, et certains médias continuent à réserver un accueil surprenant à leurs thèses délirantes. Comprendre comment une telle aberration a pu voir le jour est donc plus que jamais nécessaire. Tel est le but des essais réunis dans ce livre.
Pierre Vidal-Naquet (1930-2006), historien, a été directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et directeur du Centre Louis-Gernet, fondé par Jean-Pierre Vernant. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur la Grèce ancienne et sur l'histoire contemporaine.
Bien qu'elle puisse paraître réduire l'objectif du grand théâtre du monde à une poignée d'hurluberlus révisionnistes à laquelle il avait déjà réglé son compte en une centaine de pages impeccables de 1980, ici reprises, bien qu'un des intérêts, à échelle microscopique , soit de montrer que la synergie du révisionnisme est venue de la collusion d'une fraction de l'ultragauche –la " secte " de Pierre Guillaume – avec des reliquats plus ou moins avoués de l'extrême-droite antisémite, la portée de l'entreprise de Pierre Vidal-Naquet s'élargit à une belle leçon de méthode historique. Le propos de Pierre Vidal Naquet, historien de l'Antiquité, n'est pas la traque positive des faits et documents. [...] L'historien n'a pas ici à se colleter avec des preuves, même s'il en connaît la force et la faiblesse, mais avec des mécanismes mentaux, avec les arguties et les paralogismes qui permettent de les contourner, de les subvertir, de les disqualifier et d'en brouiller l'effet. D'un côté, les contemporains de l'Holocauste n'ont voulu croire que ce qu'ils ont fini par croire. De l'autre, ses actuels négateurs sont bien décidés à ne voir que ce qu'ils veulent croire. [...] C'est un concentré de mauvaise foi à l'état pur, dont Vidal-Naquet dissout magistralement les ingrédients d'autant plus sournois et pervers, qu'elle prétend s'appuyer sur le criticisme historique et se parer de ses vertus démystificatrices. Admirable Vidal-Naquet ! S'il n'existait pas, il faudrait l'inventer, et l'on aurait du mal. Non pas seulement parce qu'il a eu le courage de s'infliger le décorticage éprouvant d'une littérature plutôt décourageante. Non pas seulement parce que en ce passage grinçant que nous vivons de la mémoire l'Histoire, il est, en sa personne, le lien vivant entre la fidélité au vécu et la critique de l'appris. Mais parce que, en ces temps de trouble où l'Histoire, surtout la plus neuve, court le risque de perdre sa vertu dans son flirt avec la fiction, il a conservé, chevillé au corps, le sens exact du réel. Et le culte rare, intransigeant, de la complexe et pourtant simple vérité.
1987-11-30 - Pierre Nora - Le Point
" Face au " révisionnisme" plus efficace qu'une législation d'exception, qui a alimenté en bois le bûcher, Pierre Vidal-Naquet a ciselé une arme parfaite : Les Assassins de la mémoire. Faites-le lire autour de vous, apprenez-le par cœur, pour le contenu et la méthode. "
LE FIGARO
" Le combat que Pierre Vidal-Naquet livre contre les " assassins de la mémoire "est sans doute le plus difficile de ceux qu'il a eu à mener, parce que le plus douloureux. Car la mémoire qu'ils assassinent, c'est la mémoire commune de notre XXe siècle et la plus insoutenable. On appréciera d'autant plus la force d'un livre qui ne cède à aucun moment aux facilités de la confidence, de l'émotion ou de l'invective [...]. Par son acuité, sa transparence, cette leçon de méthode devrait rendre confiance à tous ceux qui en venaient à se demander si le métier d'historien a encore un sens. Si vous voulez savoir tout ce qui se cache derrière " le point de détail " de Jean-Marie Le Pen, lisez Pierre Vidal-Naquet. "
LE NOUVEL OBSERVATEUR
2024-10-11 - PRESSE
Préface à l'édition de 2005
Avant-propos
1. Un Eichmann de papier (1980)
Anatomie d'un mensonge
I. Du cannibalisme, de son existence et des explications qui ont été données
II. De La Vieille Taupe et des cannibales
III. De l'histoire et de sa révision
IV. De la méthode révisionniste
V. Moscou, Nuremberg, Jérusalem
VI. Les comptes fantastiques de Paul Rassinier
VII. La guerre des Juifs
VIII. De l'art de ne pas lire les textes
IX. De Platon, du mensonge et de l'idéologie
X. Vivre avec Faurisson ?
Annexe : Zyklon B, par Pitch Bloch
2. De Faurisson et de Chomsky (1981)
3. Du côté des persécutés (1981)
4. Thèses sur le révisionnisme (1985)
I. D'un révisionnisme l'autre
II. Des mythes de guerre et du cheminement de la vérité
III. Qu'il est plusieurs demeures...
IV. D'un mélange explosif
V. Des nations et d'Israël
VI. L'histoire après Auschwitz
5. Les assassins de la mémoire (1987)
I. la destruction des Hilotes de Sparte
II. L'Histoire et les histoires
III. Discours-mémoire-vérité
IV. La secte
V. L'histoire et la nation
VI. Auschwitz et le tiers monde
VII. La confusion des sentiments
VIII. En guise de conclusion
6. Qui sont les assassins de la mémoire ? (1992)
En guise de postface : Le négationnisme en France, par Gisèle Sapiro.