Sommes-nous au bord d'un embrasement du monde ? Depuis que le président Bush a déclaré une " guerre sans fin " contre le terrorisme et les pays de l'" axe du mal ", qui a débouché sur l'invasion de l'Irak, de nombreuses voix se sont élevées en Amérique pour interpeller l'Europe : elle devrait exercer une médiation, fournir un contrepoids, pour retenir les États-Unis sur la pente de la militarisation et d'une remise en question des droits démocratiques, et préserver le monde entier d'une polarisation irrémédiable entre " civilisations " hostiles. À cette demande, les experts en stratégie répondent que le décalage entre le poids économique de l'Europe et sa faiblesse militaire rend illusoire toute perspective d'influence dans les affaires mondiales. Étienne Balibar, lui, choisit de s'en saisir pour repenser les relations entre identité collective et puissance, constitutives du concept même de politique. La voie qu'il explore est celle d'une " anti-stratégie ", dans laquelle les exigences de l'action primeraient sur celles de l'homogénéité culturelle et de la forme constitutionnelle, de façon à ouvrir une alternative dans le cours actuel de la " mondialisation ". Tout en s'inspirant des leçons de l'histoire, son propos s'articule autour de quatre propositions : sécurité collective dans un " ordre public international ", relance du désarmement universel progressif et contrôlé, primat de la politique locale sur l'exploitation globale des " nouveaux conflits ", construction de l'ensemble euroméditerranéen comme exemple de réduction des " fractures " de civilisation.
Étienne Balibar, né en 1942, philosophe, est professeur émérite à l'université de Paris-X-Nanterre et professeur à l'université de Californie à Irvine. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, notamment Spinoza et la politique, Les Frontières de la démocratie, Lieux et noms de la vérité, La Philosophie de Marx, La Crainte des masses, Droit de Cité.
" Une sorte de réplique aux équations simplistes, mais politiquement dévastatrices, d'un Robert Kagan, qui oppose l'Europe pacifiste, naïve, irresponsable et somme toute décadente, à une Amérique puissante, virile, qui est, elle, capable d'employer la force pour résoudre les conflits. "
LE NOUVEL OBSERVATEUR
2024-12-09 - PRESSE
Avant-propos - 1. Europe, médiation évanouissante - Voix d'Amérique - Illusions et contradictions - Pour une " antistratégie " de l'Europe - " Vanishing Mediator " - 2. Politique de l'im-puissance. Discussion avec Bertrand Ogilvie - Bertrand Ogilvie : questions à Étienne Balibar - Étienne Balibar : réponse à Bertrand Ogilvie - Relance de Bertrand Ogilvie - 3. Éclaircissements - I. La " Lettre d'Amérique " de l'Institute for American Values et la question de la " guerre juste " - II. Déclin de " l'Occident " ? Peter Sloterdijk et la voix de l'Europe – III. " Puissance " et " faiblesse ". Robert Kagan et la critique de l'idéologie européenne – IV. La " doctrine de Monroe " et ses renversements - V. Que peut-on entendre par " ordre public international " ? – VI. La démocratie conflictuelle et le " théorème de Machiavel " - VII. La prétention de souveraineté universelle des États-Unis – VIII. Le " Choc des civilisations " et Carl Schmitt : une coïncidence ? – IX. L'Europe, une frontière " impensée " de la démocratie ? - 4. Le régional contre le mondial ? Discussion avec John Carlos Rowe - Lettre de John Rowe (15 décembre 2002 ) - Réponse d'Étienne Balibar.