Les années 1980 évoquent quelques images rutilantes : les années fric et l'entrepreneur héros, les strass et les stars kitsch, Le Pen et Touche pas à mon pote !, Jack Lang et la Fête de la musique, Jacques Séguéla et sa " génération Mitterrand ", Bernard Tapie et les Restos du cœur, le Minitel et les pin's, le cynisme des ex-gauchistes parvenus au pouvoir et la bienpensance du charity business... Que reste-t-il de cette décennie, qui est d'abord celle d'un affaissement général et du grand renoncement ? Pourquoi apparaît-elle à ceux qui l'ont vécue comme un cauchemar intellectuel et politique ? Dans quelle mesure les années 1980 permettent-elles de comprendre la France d'aujourd'hui ?
 François Cusset montre que cette décennie signe avant tout la disparition du sens critique : des " experts " professent le marché comme fin de la politique tandis que des " intellectuels " médiatiques délivrent des sermons simplistes. On a ainsi vu triompher une idéologie réactionnaire d'un genre nouveau. La télévision, devenue le cœur de l'espace public, a commencé à diffuser le bavardage publicitaire qui lui tient lieu de vision du monde.
 Des tubes aux essais en passant par des romans et des slogans, François Cusset est parti traquer la vérité de cette décennie terrible. Mais il montre aussi comment la pensée critique a continué son travail souterrain, pour ouvrir, au milieu des années 1990, de nouvelles perspectives intellectuelles et politiques.
 
 
                
 
                                            François Cusset est historien des idées, professeur à l'université de Paris-Ouest Nanterre, et l'auteur de nombreux ouvrages remarqués dont à La Découverte, French Theory (2003) et La Décennie (2006).

Introduction
 Restauration, récréation 
 I. Treize étapes 
 1. Préambule : l'agonie des années soixante-dix (1976-1979) 
 L'entre-deux-mondes 
 Contre-révolution intellectuelle 
 Le consensus humanitaire 
 Les technocrates du bonheur 
 Libertaires en col blanc 
 Le système et la crise 
 2. 1980 : le retour à l'histoire-géo 
 Coluche cinquième candidat 
 3. 1981 : techno-parade 
 Jacques Attali de l'École au Château 
 4. 1982 : l'influence au pouvoir 
 Tocqueville, ce héros 
 5. 1983 : soyons créatifs 
 Pascal Bruckner et la déculpabilisation des petits blancs 
 6. 1984 : vive la crise ! 
 Jean-Paul Baudecroux et la liberté privatisée 
 7. 1985 : melting-potes 
 Luc Ferry et la pensée 86 
 8. 1986 : l'idéologie de la mort des idéologies 
 Bernard Tapie " wonderboy " et propagandiste 
 9. 1987 : extase télévisuelle 
 Le lamento d'Alain Finkielkraut 
 10. 1988 : La République du centre 
 Laurent Joffrin et l'impatience décennale 
 11. 1989 : rhétoriques de la fin 
 François Furet et l'avenir d'une Réaction 
 12. 1990 : la persistance des spectres 
 Régis Debray et la politique des médiations 
 13. Postfa(r)ce : impuissance et réveil (1991-1995) 
 Morales de guerre 
 Les noces de la Loi et du Spectacle 
 Le crépuscule de la mitterrandie
 Politique non gouvernemantale 
 L'événement 1995 
 Intermezzo. La société écran
 II. Cinq figures 
 1. La fin sans fin de la politique 
 Politique de l'inéluctable 
 L'impossible compromis 
 " Néophilie " et fantasme du changement 
 Les trois chantages du clerc 
 La République, la Nation et les autres 
 2. L'ordre des experts 
 Double assaut sur la critique 
 État savant et gauche experte 
 L'essor de l'Homo psychologicus 
 Les sociotypes et le silence des classes 
 Contre-expertise 
 3. La gestion des corps 
 Sois un individu ! 
 Injonctions biopolitiques 
 Une triple expropriation 
 L'aventure et le corps (du) gagnant 
 Génération jeuniste 
 Le sida et les corps invisibles 
 4. L'esprit de l'entreprise 
 Mythologies managériales 
 Le désir du chef 
 Les collectivités loquaces
 Vertige publictaire 
 Le nouveau précariat 
 5. La culture, c'est la vie 
 Le kitsch, le mièvre et le décoratif 
 Réseaux culturels et culture du réseau 
 Le Languisme, politique de vie 
 La nouvelle économie culturelle 
 Gauchisme culturel et journalisme de marché 
 Épilogue. Affects politiques 
 Index 
 Remerciements.