Razmig Keucheyan est docteur en sociologie et professeur de sociologie à l'université de Bordeaux.
2013-11-19 - Florian Gulli - L'Humanité
Depuis que la Théorie Critique est en voie de disparition, les pensées critiques tendent, elles, à proliférer. Elles recouvrent aujourd’hui des acceptions aussi multiples que « la théorie queer » développée par la féministe nord-américaine Judith Butler, la métaphysique de l’événement proposée par Alain Badiou, la théorie du postmodernisme de Fredric Jameson, le postcolonialisme de Homi Bhabha et Gayatri Spivak, l’open marxism de John Holloway ou encore le néolacanisme hégélien de Slavoj Zizek » (p. 8). Autrement dit, les formes de critique qui tendaient à être unifiées, notamment dans le marxisme occidental, sont devenues non seulement très disparates entre elles, mais bien souvent contradictoires les unes envers les autres. Leur forme commune est sans conteste « l’hybridation » (p. 94), principalement entre les multiples avatars du marxisme et du poststructuralisme. C’est en partant du constat de la « défaite de la pensée critique » que l’auteur entend montrer les spécificités des nouvelles pensées critiques.
2014-01-23 - Lecture
Sécheresses, ouragans, inondations : aux quatre coins du monde, les catastrophes climatiques charrient leur lot de drames humains et d’images spectaculaires. Et posent une question prosaïque : qui paiera les dégâts ? Quand ils ont trop à perdre, les assureurs se défaussent sur les Etats. Mais ces derniers, étranglés par la dette, peinent à assumer. Ils se tournent alors vers les marchés financiers, leurs calculs glacials et leurs produits spéculatifs.
2014-03-01 - Le Monde diplomatique
Pour Razmig Keucheyan, c'est le développement du capitalisme qui a provoqué la crise écologique. L'auteur démontre qu'une approche consensuelle où tous se donneraient la main pour sauver la planète en éteignant la lumière en sortant d'une pièce est une mystification. L'humanité ne subit pas uniformément la crise écologique nous dit-il avec de nombreux exemples dans le monde entier. La thèse du livre rappelle la phrase attribuée à Lénine: "Les capitalistes vous vendront la corde avec laquelle nous nous pendrons". Car au final, nul ne peut échapper à la contamination généralisée de l'eau, de l'air et du sol.
2014-04-01 - L'Écologiste
Le titre sonne comme une charge et c'en est une. Car l'auteur ne croit pas à un pacte écologique consensuel. Au contraire. Via la localisation des décharges toxiques aux États-Unis, il s'attache à démontrer qu'il existe "un racisme environnemental". Même constat pour les nouveaux produits d'assurance de risques liés au climat, dénoncés comme "une financiarisation de la nature". La conclusion est encore plus sombre: avec l'augmentation prévisible des réfugiés climatiques vers 2050, l'humanité risque d'aller vers des "guerres vertes". Trop pessimiste ? En des termes plus policés, le 5° rapport du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) évoque, lui aussi, ce sombre scénario. À nous de l'éviter.
2014-05-01 - Olivier Nouailles - La Vie
« L'humanité ne subit pas uniformément les conséquences de la crise écologique. » L'ouragan Katrina, survenu en 2005, en fut un révélateur. Parmi les victimes, la surreprésentation des Noirs - 68 % de la population de La Nouvelle-Orléans avant la catastrophe et 84 % des disparus - n'est pas due au hasard : ces personnes qui habitaient des quartiers implantés dans des zones immédiatement inondables ont été moins fréquemment secourues, et moins vite. L'accès aux ressources offertes par la nature et l'exposition aux risques naturels et industriels dessinent une géographie inégalitaire sur laquelle le sociologue Razmig Keucheyan, maître de conférences à la Sorbonne, a choisi de mettre l'accent. Pourquoi la plupart des 670 sites industriels classés Seveso se trouvent-ils à proximité de quartiers populaires, sinon parce que le prix du foncier y est très bas ? Installation des industries polluantes sur les sites d'anciennes plantations dans le sud des Etats-Unis, impact spécifique de la canicule en France sur les ouvriers, saturnisme chez les enfants d'immigrés, guerres de l'eau en Amérique latine... Ces exemples constituent le point de départ d'une réflexion documentée sur les soubassements systémiques de la crise écologique.
2014-05-09 - Marion Rousset - Marianne
L'auteur prend le contrepied d'une approche consensuelle qui voudrait rassembler l'espèce humaine autour du défi écologique. Il met en lumière les affrontements sociaux, raciaux, etc. dont l'écologie est le théâtre aujourd'hui. Selon lui, le capitalisme réagit à ce type de crise en distribuant de manière inégale les conséquences négatives de la civilisation industrielle et du changement climatique. Des mouvements pour la justice environnementale se sont levés face à ce "racisme environnemental". Il développe ensuite deux moyens qu'ont les sociétés capitalistes pour répondre aux situations qu'elles induisent: la financiarisation, avec le développement pervers du secteur des assurances sur les catastrophes naturelles, et la guerre, qui est l'un des leviers sur lesquels s'appuient les états pour répondre à la finitude des ressources et aux conséquences sociales des catastrophes écologiques. Un essai instructif pour une écologie de combat.
2014-10-01 - Silence
L’objet de Razmig Keucheyan est de revisiter, dans une perspective marxiste, les causes et les conséquences de la crise environnementale et de contribuer ainsi au renouvellement de la critique écologiste. Le sociologue considère en effet que cette dernière reste aveugle à la force de résilience et de renouvellement du capitalisme, discret mais plus que jamais actif dans la gestion inégalitaire des dégâts environnementaux qu’il génère et des profits qu’il compte en tirer.
2015-09-01 - Sezin Topçu - Revue Française de Science Politique