On estime à plus d'un million les orphelins français de la Grande Guerre. Ils sont, à ce titre, les meilleurs témoins de l'immense deuil collectif qui a gravement marqué une nation à jamais meurtrie dans sa chair. Dans cet ouvrage, Olivier Faron retrace l'histoire de ces " enfants du deuil ". Il montre en particulier comment, au lendemain de la victoire, l'État va progressivement assumer la prise en charge des enfants des tués au combat. Exaltés, voire sacralisés, par la nation, les orphelins vont occuper une place centrale dans la société à reconstruire de l'après-guerre. C'est pourquoi l'histoire des orphelins est aussi celle des débats qui ont animé le monde politique sur les modalités de leur prise en charge. Disputant cette mission aux associations et œuvres philan-thropiques, les pouvoirs publics vont peu à peu mettre en place une politique d'assistance originale. Elle sera une étape importante de la construction de l'État social en France, seul pays européen à avoir créé un titre spécifique, encore en vigueur aujourd'hui : celui de " pupille de la nation ". Cependant, le travail de l'historien invite à dépasser les pratiques de la bienfaisance ou de l'aide publique. Les souvenirs des orphelins, des plus célèbres comme Albert Camus ou Jean-Louis Barrault jusqu'aux plus obscurs que l'auteur a pu rencontrer, permettent de montrer, au-delà de la douleur, que la perte du père a durablement structuré l'identité morale et politique de ces générations endeuillées. Olivier Faron révèle ainsi que, à côté des anciens combattants, un mouvement des orphelins de guerre s'est montré résolu à afficher de nouvelles valeurs. Glissant inexorablement du pacifisme des années trente au ralliement au maréchal Pétain, les pupilles permettent d'approcher la complexité de la société française de l'entre-deux-guerres.
Olivier Faron, ancien élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud et de l'École française de Rome, agrégé d'histoire, est professeur à l'université Lyon II. Il a publié notamment La ville des destins croisés. Recherches sur la société milanaise du XIXe siècle (1811-1860), en 1997, ainsi qu'une quarantaine d'articles dans des revues françaises ou étrangères.
" Jean-Louis Barrault, Albert Camus, Henri Queffélec et Paul Ricoeur ont au moins un point commun, celui d'être orphelin de guerre à la suite du premier conflit mondial. Tous quatre ont évoqué la perte du père dans leurs écrits. Mais comment saisir le destin et l'expérience des autres ? environ 1,1 million d'enfants en France, selon les estimations d'Olivier Faron, sont pupilles de la nation- ceux qui ne parlent pas ? L'historien, dans une étude très riche sur la question, en a interrogé un certain nombre et a lu ce qu'on disait d'eux ou ce qu'ils exprimaient. Il privilégie cependant l'étude des politiques menées à leur égard et le classique point de vue institutionnel. "
LE MONDE
" Il fallait à la fois la rigueur d'un démographe et l'inventivité d'un chercheur ouvert aux travaux de psychologie enfantine pour dire ce que fut le deuil infini de la Grande Guerre [...] Olivier Faron parvient a retracer les aléas d'un traumatisme qui s'étend parfois sur plusieurs générations [...] C'est un grand livre d'histoire culturelle et une contribution majeure à la compréhension de l'après-guerre. "
NOTRE HISTOIRE
" Avec ce beau livre, Olivier Faron apporte une contribution essentielle non seulement à l'histoire de la culture de guerre du premier conflit mondial, mais aussi à celle de la famille et de l'enfance pendant la première moitié du XXe siècle."
L'HISTOIRE
" Remarquable est l'essai que consacre Olivier Faron au gros million d'orphelins français que la Grande Guerre créa. Ces pupilles de la nation, qui représentent 1,8% de la population en 1929, Faron les suit de 1914 au second conflit, dans leurs drames et dans le lobby qu'ils constituent. Il montre comment les associations et les pouvoirs publics les soutiennent et les prennent en chargent, créant ainsi une politique d'assistance originale. Et comment les morts vivent dans leurs enfants à qui la mort de leur père a donnétrès souvent un sens à leur vie. "
VALEURS ACTUELLES
" Olivier Faron comble une vraie lacune, car nous connaissions très mal, jusqu'ici, le sort des orphelins et pupilles de la Nation de 1914 à 1941 [...] On voit l'intérêt du livre qui s'avèrera rapidement incontournable dans son domaine. O. Faron a su montrer quelles solutions originales par rapports à d'autres pays la France a imaginées pour résoudre les problèmes des enfants frappés par la guerre [...] Bref, sur un sujet certes austère, mais qui, lecture faite, s'avère assez riche et dans des domaines très différents, un livre classique et réussi. "
MOUVEMENT SOCIAL
" Sa méthode autant que ses résultats classent assurément l'étude d'Olivier Faron parmi les plus utiles et les plus neuves qui aient été consacrées ces dernières années à la France du premier 20e siècle. "
XXe SIÈCLE
" L'histoire de la Première Guerre mondiale, qui s'écrit et se réécrit depuis quelque trois quarts de siècle, traverse depuis une vingtaine d'années un renouvellement de problèmatiques en tous points stimulants. Les travaux novateurs entre autres d'Annette et Jean-Jacques Becker, de Stéphane Audoin-Rouzeau, pour le champs de bataille français, ceux de Jay Winter et de John Horne, pour d'autres fronts, ont permis et permettent encore de percer une approche souvent très factuelle de la Grande guerre. Cet ouvrage, écrit avec élégance, issu d'une thèse d'habilitation à diriger des recherches, s'inscrit pleinement dans les travaux signalés. Si Olivier Faron fait ici oeuvre d'historien, en plongeant dans les très riches archives départementales, en recourant aux témoignages oraux des obscurs comme aux récits de plus illustres contemporains - Albert Camus, Henri Queffélec ou Jean-Louis Barrault -, l'auteur dépasse avec bonheur la périodisation de la prise en compte progressive, par l'État, des orphelins pour se faire tour à tour et en même temps anthropologue - que l'on songe aux apports à cet égard de Philippe Ariès et de Michel Vovelle-, sociologue, juriste. "
CAHIERS JAURÈS
2024-12-11 - PRESSE
Introduction
I. Devenir orphelin
Un deuil infini
Laisser ses proches
Une perte irrémédiable
Le drame partagé et représenté
Les premières réponses
2. Le monde associatif au secours des orphelins
L'assistance aux orphelins au début du conflit
Objectifs des associations
L'affirmation des associations pour les orphelins de guerre (115-1918)
Le panorama associatif à la fin du conflit
3. Une loi pour les orphelins
Le terreau de la loi
Le cheminement parlemenetaire
Agir pour les orphelins
La mise en place d'une administration spécifique au service des pupilles
II. Grandir en tant que pupille dans les années vingt
4. Orphelin, pupille, ayant droit...
Quels droits pour quels enfants ?
La réparation en acte
Une administration ad hoc
5. L'aide au quotidien
Le lent déclin de l'assistance privée
L'action publique au plus près des enfants
Des secours au cas par cas
6. Vivre le deuil
Le deuil au jour le jour
Le deuil glorifié : Le "sel de la Nation"
Autour des monuments aux morts
III. Devenir adulte dans les années trente
7. Quand les pupilles redeviennent orphelins
Le seuil de la majorité
Des offices face aux mutations des années trente
8. Le "lobby" des orphelins de guerre
Les orphelins au sein du monde combattant
L'apparition d'un mouvement orphelin de guerre
9. En guise de bilan
Des réussites
Des destins funestes
Un bilan contrasté
Conslusion
Annexe : Un bilan chiffré du groupe des pupilles de la nation
Bibliographie.