Les institutions politiques des régimes démocratiques contemporains (Parlements, gouvernements, présidents, partis politiques, etc.) ont un pouvoir normatif à nul autre pareil qui leur permet de classer, d'organiser et même d'officialiser l'existence des groupes sociaux et leurs différentes activités. Leur étude aide à mieux comprendre le fonctionnement des sociétés contemporaines. 
 Celles-ci soulève cependant un certain nombre de questions. Si, en effet, les institutions politiques sont créées en vue d'établir une coopération stable et pacifique entre des acteurs qui défendent des intérêts contradictoires, comment expliquer le changement ? Comment comprendre la distribution inégale du pouvoir dans nos sociétés ? Quel pouvoir les institutions politiques peuvent-elles bien avoir sur ceux qui les incarnent ?
 À ces questions, les sciences sociales n'apportent pas de réponse unanime. Mais le développement de l'analyse institutionnelle en France et outre Atlantique depuis une vingtaine d'années permet de faire une synthèse des connaissances sur cet objet.
 
                
Delphine Dulong enseigne la science politique à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne où elle dirige le CRPS-CESSP. Elle est notamment l'auteure de Moderniser la politique. Aux origines de la Ve République (L'Harmattan, 1997) et de La Construction du champ politique (PUR, 2010).

Les institutions font l'objet d'un engouement certain de la part des chercheurs en sciences économiques et sociales depuis une vingtaine d'années. Un foisonnement qui, comme souvent, n'est pas sans entraîner un certain nombre de confusions. D'où l'intérêt de cette synthèse qui, comme son auteure, politiste, prend soin de le préciser, ne prétend pas à l'exhaustivité. En se focalisant sur les institutions formellement reconnues par les structures d'Etat, elle met en évidence un certain nombre de propriétés et d'effets de ces dernières. Loin d'être les lieux neutres et atemporels qu'elles s'efforcent de paraître, ces institutions contribuent en effet à délimiter l'espace du pensable en même temps qu'elles légitiment l'ordre établi. D'où la nécessité de les étudier, et ce en combinant les perspectives plutôt qu'en se cantonnant à l'une d'entre elles, comme l'utilitarisme ou le fonctionnalisme.
2012-09-01 - Igor Martinache - Alternatives Economiques

Introduction 
 I / Le renouveau de l'analyse institutionnelle 
 L'" ancien " institutionnalisme 
 Les institutionnalismes contemporains 
 II / L'institution du politique : genèses et changements de régimes 
 Des configurations politiques originelles aux processus de définition des institutions 
 Les institutions politiques ne sont pas des arènes neutres - Un processus que personne ne maîtrise 
 Les différentes temporalités du changement institutionnel 
 Le temps court du changement - Le temps long du changement - Derrière la " façade ", le changement perpétuel 
 III / L'institution en représentations 
 La légitimation des institutions 
 Les registres de mise en forme symbolique des institutions politiques 
 Le registre de la continuité - Le registre légal - Le registre du sacré 
 IV / L'incorporation des institutions 
 L'" emprise " de l'institution 
 Les débats sur les ressorts de l'obéissance - La complexité des rapports à l'institution
 Les variables de l'emprise institutionnelle 
 L'histoire immédiate - L'histoire incorporée - L'histoire faite chose 
 V / Les effets politiques et sociaux des institutions politiques 
 Les institutions fondent l'action politique 
 Un stock de ressources qui objectivent l'exercice du pouvoir - Un stock public de connaissances qui facilite la coordination de l'action 
 Les institutions délimitent l'espace du possible 
 Les institutions politiques objectivent l'ordre social 
 Conclusion 
 Repères bibliographiques.