Peut-on civiliser les drogues ? L'interrogation est scandaleuse : la guerre à la drogue ne doit-elle pas être menée sans merci, les trafiquants pourchassés, les toxicomanes soignés ou punis ? Le discours du " tout répressif " sous-tend toujours la loi mais, progressivement, une nouvelle logique de pensée a pris forme. L'élargissement de la lutte contre les toxicomanies à l'alcool et au tabac marque en effet une véritable révolution dans les esprits : nous nous affrontons désormais à la réalité des risques, que les drogues soient licites ou illicites. Ce tournant fut pris pour faire face à l'épidémie de sida ; parce qu'il fallait agir efficacement, il a fallu accepter de parler vrai. Pour comprendre comment se sont forgées ces nouvelles façons de penser, il faut aller au plus près du terrain, à la rencontre des usagers de drogues, ce qui ne va pas de soi. C'est cette aventure que nous raconte Anne Coppel, pionnière de la " réduction des risques ", en France. Femme de terrain et chercheuse, elle retrace ici dix années d'expérience qui sont aussi dix années de luttes communes menées par des chercheurs, des praticiens et des usagers de drogues. Car l'ambition de l'auteur est bien là : sortir les drogués de leur ghetto en donnant les clés des débats actuels, qui, de l'insécurité au communautarisme, dépassent largement la question des drogues. Il en ressort un livre passionnant, à la fois journal de bord de l'auteur, et synthèse remarquable de cette " aventure de l'esprit " que fut la politique de réduction des risques en France.
Anne Coppel, sociologue, a été présidente de " Limiter la casse ", l'association qui a impulsé en France la réduction des risques. Elle est notamment l'auteur, avec Christian Bachmann, de Le Dragon domestique (Albin Michel, 1989 ; réédité sous le titre La drogue dans le monde, Points Seuil). En 1996, elle a reçu, à Florence, le prix international Rolleston Award de la réduction des risques.
" Liant, avec brio, ses connaissances scientifiques et son expérience de terrain, Anne Coppel explique comment se sont forgées ces nouvelles façons de penser, à travers les initiatives innovantes – et les luttes communes – menées par des chercheurs, des praticiens et des usagers pour civiliser les drogues . "
ACTUALITÉS SOCIALES HEBDOMADAIRES
" Dans le monde de la toxicomanie, Anne Coppel est unique. C'est une des personnalités les plus attachantes, peut-être parce que la plus sincère. Elle s'est parfois trompée, ose le dire. Elle s'est battue surtout. Depuis plus de vingt ans que cette sociologue pratique ce domaine, elle a suivi, subi, ou impulsé toutes les évolutions que la société française a pu connaître. De la drogue plaisir des années 70, la drogue n'est pas une maladie dans les années 80, puis au tournant majeur pour cause d'épidémie de sida dans les années 90 avec la mise en place de ce que l'on appelle la politique de réduction des risques.
Le livre qu'elle vient de terminer lui ressemble, mêlant histoire personnelle et histoire collective. Il analyse avec précision l'émergence d'une parole : celle des toxicomanes. Surtout, le livre décortique comment, peu à peu, se fait jour une politique de santé publique autour de la dépendance. Anne Coppel le fait, d'abord en se regardant, en tentant de comprendre ce que l'on ne voulait ni voir, ni entendre. [Elle] raconte de l'intérieur cette révolution sanitaire, aujourd'hui toujours fragile. "
LIBÉRATION
" Si le titre est en forme de question, le livre d'Anne Coppel est bien en forme de réponse. C'est en militante qu'elle entend démontrer l'inanité de la guerre contre la drogue et les bienfaits de la réduction des risques. Mais la sociologue va surtout entrer dans le détail de ses combats, des combats dont les victoires vont servir de support à la démonstration. "
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
" Ce livre a la couleur du sang, de la chair brûlée et de l'effroi. Des centaines de morts renvoyés dans le silence sous le soleil du jugement : on ne peut pas s'occuper de la santé d'un toxicomane qui se détruit lui-même. Les gardiens du corps, des âmes et des poisons sont unanimes, il n'y a pas de guérison possible. Combien d'hommes cette attitude morale a-t-elle jeté en prison ? [...] Telle est la posture pragmatique de l'auteur : au lieu de viser une guérison finale qui redouble la désertion, mieux vaut faire que les usages soient les moins dangereux possibles. Il ne s'agit plus de poser la question combien de toxicomanes sont guéris ? Mais plus sobrement combien de morts peut-on éviter ? Anne Coppel en appelle à une "contrainte généreuse ", adaptée à la situation, pour installer une dynamique et non une soumission. Ce livre est un plaidoyer pour les équipes d'outreach qui incitent les usagers à utiliser tous les services disponibles, pour les actions de self-help qui encouragent l'auto-organisation des milieux, et d'arrêter les rêves qui se fracassent contre l'épouvante. La posture est profonde, déterminée. Elle impressionne. "
MOUVEMENTS
" Ce livre se lit comme un roman ; pas un roman noir mais un polar peut-être. "
REVUE CRITIQUE D'ÉCOLOGIE POLITIQUE
" Peut-on civiliser les drogues ? d'Anne Coppel est un livre de militante, un ouvrage de conviction. Anne Coppel s'attaque à l'image (aux images plutôt) généralement perçue(s) du drogué, ainsi qu'au ciblage soutenu par la logique institutionnelle et médicale. La politique défendue par Anne Coppel et les tenants de la dépénalisation a produit des effets spectaculaires : les tabous se sont effondrés, le poids des interdits s'est fait moins lourd, la distribution et l'échange des seringues ne sont plus pénalisés, les traitements de substitution sont entrés dans les moeurs, des associations d'usagers de la drogue ont vu le jour, subventionnées par le gouvernement. Si les toxicomanes n'ont pas disparu, du moins ont-ils trouvé une écoute et un soutien. "
INFORMATIONS SOCIALES
2024-11-04 - PRESSE
Préface, par Jean-Michel Belorgey
Remerciements
Introduction
Prologue : une nouvelle donne
I / À la rencontre des usagers de drogues
1. Aller à la rencontre des usagers de drogues : pour quoi faire ?
2. Les cahiers de confidences
3. Le Bus des femmes
4. La seringue brûle les doigts
5. Y a-t-il des toxicomanes qui se droguent ?
6. L'ethnographie à la rencontre des toxicomanes
7. Chicago ou la naissance de l'outreach
8. Les prises de risques dans leur contexte
9. La prise de risques dans les relations sexuelles
10. Arcades, une action communautaire en Seine-Saint-Denis
11. Santé publique, santé communautaire
II / L'invention des traitements de substitution
12. Le retournement du corps médical
13. La médicalisation : une illusion dangereuse ?
14. Quand le changement des pratiques précède le changement des opinions
15. Peut-on sortir de la toxicomanie ?
16. Du contrôle de l'usage au traitement : " Méthadone-insertion " à Pierre-Nicole
17. Genèse d'un médicament
18. Médecins ou dealers en blouse blanche ?
19. La réduction des risques infectieux : l'invention d'un dispositif
20. La méthadone est-elle un substitut à la prohibition ?
21. Changement de paysage
22. Usagers de drogues ou patients ?
23. La clinique Liberté, entre traitement et action communautaire
24. L'irrésistible ascension du Subutex
25. Des résultats remarquables
Conclusion
Annexe
Cannabis : le débat - Henrion (commission)
Limiter la casse
Méthadone résultats
Réduction des risques, principes et résultats internationaux
Réduction des risques, résultats, France
Chronologie de la réduction des risques en France.