Depuis les années 1980, dans nombre de démocraties occidentales, la représentation politique est en crise. De la " faillite des institutions " à l'" affaissement de la nation " en passant par le " communautarisme " bien des explications sont avancées. Et s'il fallait chercher ailleurs ? C'est l'hypothèse provocante qu'explore Daniel Bougnoux dans ce livre singulier : pour lui, la crise de la représentation politique ne peut se comprendre sans l'inscrire dans celle, bien plus large, qui affecte depuis plus d'un siècle la notion même de " représentation ". Preuves à l'appui, puisées dans un corpus impressionnant d'œuvres littéraires et artistiques, il montre comment les avant-gardes du XXe siècle ont progressivement sapé les effets de la " mise à distance ", du détour par l'ordre symbolique. Hier, le théâtre, la peinture ou le cinéma proposaient une coupure nette entre l'illusion et le monde réel ; la culture fondée sur le livre contenait ce réel à bonne distance, en refoulant la présence des corps derrière des représentations plus abstraites. Aujourd'hui, passant du livre au live, les nouveaux médias nous invitent au festin d'une vie immédiate, au commerce des " coups " et à la contagion des passions. La presse semble toujours plus pressée, l'art cherche sur les corps une emprise directe, les spectacles deviennent contacts et notre société se fragmente en communautés réduites aux affects... Mais les effondrements symboliques liés à ces mutations ne cachent-ils pas la difficile naissance de formes nouvelles, où l'individu démocratique aurait toute sa place ?
Daniel Bougnoux, philosophe, professeur (émérite) à l'Université Stendhal de Grenoble, Daniel Bougnoux est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages, dont, à La Découverte, La Communication par la bande (1991, Prix Rhône-Alpes du livre) et Introduction aux sciences de la communication (coll. " Repères "). Rédacteur en chef, auprès de Régis Debray, des Cahiers de médiologie (Gallimard) puis de la revue Médium (éditions Babylone), il dirige la publication des Œuvres romanesques complètes d'Aragon dans la " Bibliothèque de la Pléiade ".
" Il montre comment les avants-gardes du XXè siècle ont, peu à peu, sapé les effets de "la mise à distance", du détour par l'ordre symbolique.Les nouveaux médias attisent notre impatience, nous entraînent vers le culte de l'immédiat et une satisfaction sans distance. Loin du temps long de la réflexion et de la méditation. "
LA CROIX
" Dans un ouvrage dense, foisonnant, pas commode à lire, mais toujours brillant, l'universitaire grenoblois Daniel Bougnoux s'attaque à ce qu'il nomme La crise de la représentation, que cette représentation reléve de la littérature, de l'art, du spectacle, des médias ou même de la politique. Stigmatisant "une presse trop pressée" et "l'information en flux tendu", décrivant un monde du "zero stock" et du "no future", l'essayiste aiguise là sa vision décapante - mais nullement catastrophique - de notre société. Volontiers papillonant, Bougnoux se livre à des coups de sonde parfois inattendus (mais souvent fertiles), s'interrogeant notamment sur les raisons de l'actuel engoument pour la danse et la chorégraphie [...] Et le lecteur progresse ainsi, fasciné, abasourdi, contournant les scories de la langue de bois universitaire et tentant de s'accrocher aux élans virtuoses d'une intelligence vive, mobile, pétillante, équilibriste - en tout point stimulante. "
LES AFFICHES DE GRENOBLE ET DU DAUPHINÉ
2024-12-13 - PRESSE
Prologue - 1. La présence réelle - 2. On s'empare d'une scène - 3.Indice énergumène : le choc de la photographie - 4. Manifestation, représentation, spectacles - 5. Une communication plus directe - 6. Une presse trop pressée - 7. Le toucher, l'immersion - 8. Effondrements symboliques - 9. Traversée de la terreur - 10. Pour une éthique de la représentation - Index des intercesseurs.