La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre

Yves Lacoste

En 1976, la première édition de ce livre dans la " Petite collection Maspero " fit grand bruit. Il faut dire que le géographe Yves Lacoste y proposait une analyse iconoclaste : il fustigeait la " géographie des professeurs ", apparue au xixe siècle et progressivement devenue un discours idéologique masquant l'importance politique de toute réflexion sur l'espace – tandis que sa variante scolaire a longtemps été vue comme l'un des enseignements les plus rébarbatifs. Mais, surtout, il montrait qu'existait aussi une autre géographie, plus ancienne et toujours actuelle, la " géographie des états-majors ", ensemble de connaissances rapportées à l'espace et constituant un savoir stratégique utilisé par les dirigeants.
À rebours de ces deux conceptions, Lacoste affirmait que les questions soulevées par la géographie concernent en réalité tous les citoyens : des questions multiformes, à la croisée de nombreuses disciplines. La pertinence de ce livre devenu culte reste entière, à une époque où la géopolitique défendue par Yves Lacoste est entrée dans les moeurs et où l'analyse des conflits régionaux et internationaux, toujours complexe, s'est imposée dans le débat public.


Version papier : 12.00 €
Version numérique : 10.99 €
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Détails techniques
Collection : La Découverte Poche / Essais n°399
Parution : 09/01/2014
ISBN : 9782707178367
Nb de pages : 248
Dimensions : 12.5 * 19.0 cm
ISBN numérique : 9782707181831

Yves Lacoste

Yves Lacoste

Yves Lacoste est géographe, spécialiste de géopolitique, fondateur et directeur de la revue Hérodote. Il est l'auteur notamment, de Unité et diversité du tiers monde (Maspero, 1980), du Dictionnaire de géopolitique (Flammarion, 1996), ou encore de L'Eau dans le monde. Les batailles pour la vie (Larousse, 2007).

Extraits presse

Année de grande canicule en France, 1976 avait aussi marqué un coup de chaud chez les géographes, secoués par une bande de trublions embusqués à la fac de Vincennes et emmenés par Yves Lacoste. Celui qui allait devenir le pape de la géopolitique publiait chez Maspero (La Découverte aujourd'hui) le premier numéro de la revue Hérodote, et le livre qui allait le faire connaître du public en soulevant la colère de ses confrères : La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre. L'auteur tenait au titre, et tout particulièrement aux virgules qui en scandaient l'affirmation. Plusieurs fois réimprimé, l'ouvrage était épuisé depuis la fin des années 1980. Yves Lacoste qui se définit comme un "vieux géographe" et surtout pas comme un "géopoliticien", a fini par le reprendre dans une réédition commentée et une remise en perspective passionnante

2012-10-05 - Hervé Hugueny - Livres Hebdo

 

La première édition de son livre en 1976 aux éditions Maspero avait fait grand bruit et pas uniquement à cause de son titre provocateur : La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre. Ce géographe et spécialiste de géopolitique, un mot alors encore tabou, y fustigeait "la géographie des professeurs" pour montrer l'importance politique de tout discours sur l'espace. Une réflexion qu'il poursuivra en créant la revue Hérodote. Trente-six ans après, il republie cet ouvrage désormais classique avec une longue préface inédite et des commentaires.

2012-10-12 - Marc Semo et Catherine Calvet - Libération

 

Derrière l'apparente simplicité de son titre, ce sont plusieurs livres que recèle La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre. C'est avant tout un rappel acéré des racines militaires de la discipline, et de la carte en particulier, cette représentation "efficace" mais "coûteuse" de l'espace, qui ne peut être produite, à l'origine, que par les Etats et les états-majors. S'y ajoute une critique tout aussi cinglante de la "géographie des professeurs", émolliente dans ses énumérations sans réflexion (relief-climat-végétation-fleuves...), qui ne produisent que des "bribes hétéroclites" de savoir tout en naturalisant, par l'étude des régions ou des paysages, "l'idéologie nationale". En cela, l'ouvrage constitue un puissant antidote à la nostalgie de l'enseignement traditionnel si prégnante aujourd'hui. Tout cela pourrait donner l'impression d'un pamphlet réducteur, ne faisant qu'attaquer ou déconstruire la discipline. Plus profondément, on peut y lire un éloge de la géographie, révélant sa dimension de "savoir stratégique" et, par là, émancipateur. Penser l'espace, lire une carte, varier les échelles, c'est ressembler aux guérilleros qui maîtrisent les lieux de leur lutte, à l'inverse des "paumés" qui "au sens propre, ne savent plus où ils en sont". On voit ici le ton militant d'un livre au style vivant, qui n'échappe pas toujours aux facilités, lorsqu'il s'agit de désigner des adversaires ou des cibles ("le" pouvoir au singulier, quand ce n'est pas "la CIA et le Pentagone"), mais frappe par son constant souci de réflexivité et de critique du sens commun.

2012-11-09 - André Loez - Le Monde des livres

 

Publié pour la première fois en 1976 dans la " Petite collection Maspero ", La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, n'était pas passé inaperçu. Le titre et la thèse étaient iconoclastes. Yves Lacoste montrait comment la géographie universitaire et celle qui était enseignée dans le secondaire refusaient à l'espace toute dimension politique, stratégique et militaire. Choisissant de réintégrer ces enjeux, il redéployait le savoir géographique de belle manière. Il pouvait s'appuyer pour ce faire sur la revue qu'il venait de créer, chez Maspero aussi, Hérodote, sous-titrée Revue de géographie et de géopolitique. Trente-six ans plus tard, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre est réédité avec une préface inédite de l'auteur qui évoque la première réaction de François Gèze, patron de La Découverte : " Ce n'est pas un titre ! ". Le fameux " flair " de l'éditeur fut pour une fois pris en défaut. Car ce fut un bon et grand titre, désignant précisément ce que contenait le livre et allant au-delà avec son caractère de manifeste permanent. Yves Lacoste rappelle aussi que la phrase était apparue, quelques mois auparavant, dans le premier numéro d' Hérodote.

2012-12-01 - Vincent Duclert - La Recherche

 

Ce petit livre est un grand livre. Ce fut en son temps, il y a trente-six ans, effectivement un livre de combat, qui déclarait la guerre à la géographie classique enseignée depuis le début du XXe siècle de façon scolaire et didactique, sous la forme dite de géographie régionale. L'ouvrage scandalisa alors ses pairs et ses aînés. Yves Lacoste avait raison, l'avenir le démontra. Il se référait à l'histoire de la discipline, née il y a plusieurs siècles de la cartographie militaire. Cela lui fut confirmé, quand, observateur infatigable, il sut alerter les autorités internationales sur le drame qui se jouait au Vietnam alors que des bombardements américains ciblés sur les digues du fleuve Rouge provoquaient des inondations catastrophiques, imparables grâce à la précision cartographique. Les combats scientifiques menés par Yves Lacoste au fil de sa carrière, sur le jeu des échelles (locale, régionale, mondiale...), sur les pays du Sud (on disait alors tiers-monde), sont aujourd'hui à peu près gagnés : il a rendu sa noblesse à l'analyse géopolitique du monde, dont il est devenu un spécialiste, grâce à l'excellence toujours confirmée de la revue Hérodote, qu'il créa alors. Et on a pu le paraphraser, en affirmant de façon analogue que " l'histoire, ça sert d'abord à faire des États ".

2012-12-17 - Catherine Coquery-Vidrovitch - L'Humanité

 

En 1976, l'auteur lance la revue Hérodote qui entend montrer que la géographie intéresse tous les citoyens, et pas seulement les commandements militaires, que l'on pense seulement au rôle de frontières, aux discours sur le développement... 36 ans après, l'auteur, dans une préface d'une cinquantaine de pages explique ce que ce livre a provoqué dans le milieu des géographes et des historiens et ce qui a changé depuis. De quoi réfléchir pour ceux qui s'intéressent (ou qui ne s'y intéresse pas encore) à la géographie.

2014-03-01 - Silence

 

Près de quarante ans après sa première parution, Yves Lacoste reprend son livre qui avait fortement secoué le petit monde des géographes. L'occasion pour lui de revenir, dans une longue préface, sur son parcours de géographe nourri par l'expérience de la colonisation. Pour des générations d'élèves, ses analyses de la géographie du sous-développement ont servi de base à l'étude des pays du Sud. Selon lui, la géographie est une affaire de citoyens, puisque son but est de penser l'espace "pour savoir s'y organiser, pour savoir y combattre". Au moment où, en France, les territoires font partie du débat politique quotidien, les analyses et les définitions de l'auteur du Dictionnaire de la géopolitique sont bien utiles.

2014-09-01 - Altermondes

 

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mardi 22 avril 2014

Un monde d'idées - Yves Lacoste par FranceInfo


 

Table des matières

Préface. Trente-six ans après...
L'origine d'un titre
Mon intérêt premier pour la géologie, une compréhension historique du Maroc
L'ennui au lycée, la joie de mes premiers raisonnements géographiques
L'Algérie et la chance d'y avoir rencontré Ibn Khaldoun
Conséquences du " Que-sais-je ? " sur les pays sous-développés
Plan de guerre en Haute-Volta contre les simulies vectrices de l'onchocercose
L'université de " Vincennes " et ses étudiants
L'enquête sur le bombardement des digues du fleuve Rouge
La soudaine apparition dans la presse française du mot géopolitique, puis l'essor de l'école française de géopolitique
L'école géographique française aurait pu progresser davantage
La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre
Du rideau de fumée de la géographie des professeurs aux écrans de la géographie-spectacle
Un savoir stratégique laissé aux mains de quelques-uns
Myopie et somnambulisme au sein d'une spatialité devenue différentielle
La géographie des professeurs : une coupure avec toute pratique. Pour mieux inculquer l'idéologie nationale ?
La mise en place d'un puissant concept-obstacle : la " région "
L'escamotage du problème capital des échelles, c'est-à-dire de la différenciation des niveaux d'analyse
La " réalité " apparaît différente selon l'échelle des cartes, selon les niveaux d'analyse - Une étape primordiale dans la démarche d'investigation géographique : le choix des différents espaces de conceptualisation
Les " surprenantes " carences épistémologiques de la géographie universitaire
Une pratique universitaire qui est de plus en plus la négation du projet unitaire
Absence de polémique entre géographes. Absence de vigilance à l'égard de la géographie
Marx et l'espace " négligé "
Les difficultés de l'analyse marxiste en géographie
Débuts d'une géographie marxiste ou fin de la géographie ?
Du développement de la géographie appliquée à la New Geography
Des géographes plus ou moins prolétarisés pour des recherches parcellaires confisquées par le pouvoir ?
Pour une géographie de la crise
" À bas la géographie technocratique ! ", c'est vite dit
Ces hommes et ces femmes qui sont " objets " d'étude
Il faut que les gens sachent le pourquoi des recherches dont ils sont l'objet
Les lycéens commencent à donner des coups de pied dans le paravent idéologique
Dans la hargne, les débuts, enfin, d'une grande polémique épistémologique
Savoir penser l'espace pour savoir s'y organiser, pour savoir y combattre
Pour des actions militantes plus efficaces
Annexes
1. Le diatope, schéma d'analyse des intersections d'ensembles spatiaux à différents niveaux d'analyse spatiale
2. 1976-2012, 145 numéros d'Hérodote
3. Hérodote en ligne.