Exposition "L’esprit français. Contre-cultures, 1969-1989"


du 24 février au 21 mai 2017 à La maison rouge [Paris]

La maison rouge présente L'esprit français, Contre-cultures, 1969-1989, une exposition collective et thématique, conçue par les commissaires Guillaume Désanges et François Piron.

 

De la Figuration Narrative à la violence graphique de Bazooka, des éditions Champ Libre à la création des radios libres, de Hara-Kiri à Bérurier Noir, cette exposition rend compte d'un « esprit français » critique, irrévérencieux et contestataire, en proposant une multitude de filiations et d'affinités.

L'exposition assume une forme de révision esthétique, en allant regarder vers d'autres « genres »de la création que ceux généralement mis en avant dans l'art contemporain. A travers une soixantaine d'artistes et plus de 700 œuvres et documents, elle rassemble à la fois journaux, tracts, affiches, extraits de films, de vidéos et d'émissions de télévision, issues des archives de l'Institut national de l'audiovisuel (Ina), partenaire du projet et dont le fonds, riche de programmes iconoclastes, se fait l'écho de cet « esprit français ».

C'est aussi l'occasion de présenter des pièces rarement montrées telles que des carnets du groupe Dziga Vertov (fondé par Jean-Luc Godard et Jean-Pierre Gorin), une sculpture monumentale de Raymonde Arcier ou les « livres d'école » d'Henri et Marinette Cueco ainsi que de passer commande d'œuvres inédites à Kiki Picasso (Il n'y a pas de raison de laisser le blanc, le bleu et le rouge à ces cons de français, 2016-2017), Jean-Jacques Lebel (L'Internationale Hallucinex, 1970-2017) et Claude Lévêque (Conte cruel de la jeunesse, 1987-2017).

 

La France est un pays qui ne s'aime pas, mais qui ne peut se penser ailleurs qu'au centre d'un modèle culturel, où l'auto-référentialité et l'autocélébration vont de pair. Au sortir des années 1960, une génération est marquée par la « pensée 68 », qui mêle toutes les libérations, politiques, sociales, d'esthétiques et de modes de vie, tout en se maintenant dans un quasi statu quo politique.

Cette situation va durablement marquer différentes formes de contre-cultures, mouvements d'émancipation et de contestation, et sans le savoir, créer de nouvelles formes d'avant-garde où les cultures populaires (cinéma, rock, bande dessinée, journalisme, télévision, graffiti...) influent sur les champs plus traditionnels de la culture (littérature, philosophie, art contemporain, théâtre).

Elles forment une nébuleuse trouble de pratiques autonomes qui circulent avec fluidité entre ces champs, témoignant d'un singulier « esprit français », mélange d'idéalisme et de nihilisme, d'humour caustique et d'érotisme, de noirceur et d'hédonisme. De fait, il semble qu'une humeur spécifique imprègne les marges françaises : de l'émergence d'un « mouvement de la jeunesse », grandi à l'ombre de la « société du spectacle » de Guy Debord, irrévérencieux, arrogant, politiquement équivoque, à la crise qui devient le motif central de la politique, de Giscard à Mitterrand.

 

Un catalogue co-édité par La maison rouge et les Éditions La Découverte, sous la direction de Guillaume Désanges et François Piron, accompagne l'exposition, avec des contributions de : Philippe Artières (historien), Thibaud Croisy (metteur en scène, écrivain), François Cusset (sociologue, historien des idées), Alexandre Devaux (critique, historien de l'art), Fabienne Dumont (historienne de l'art), Julien Hage (historien), Antoine Idier (écrivain, chercheur), Nathalie Quintane (écrivaine), Kantuta Quiros et Aliocha Imhoff (commissaires de la plateforme « Le peuple qui manque »), Elisabeth Lebovici (critique et historienne de l'art), Olivier Marboeuf (écrivain, directeur de l'espace Khiasma, Les Lilas), Peggy Pierrot (activiste, sociologue), Sarah Wilson (historienne de l'art).

 

Richement illustré, ce catalogue dresse une cartographie subjective de postures minoritaires et dissidentes qui ont en commun d'avoir échappé aux prescriptions de la culture officielle. Il importe moins de décider si cet « esprit français », insolent et destructeur, crâneur et festif, relève de l'invention de concept ou s'il préexiste à cette étude, que de regarder ce qu'il produit en tant qu'hypothèse pour réveiller les consciences et les désirs aujourd'hui.