Lors du débat public des années 2000 en France sur la question coloniale, on a souvent oublié que la République n'a jamais été vraiment unanime sur ce sujet. Ainsi, en 1885, quand certains républicains ont repris à leur compte l'idée monarchique de conquêtes coloniales, cela a donné lieu à des affrontements passionnés à la Chambre des députés, à l'issue desquels le projet colonial ne s'est imposé que de justesse.
D'où l'intérêt majeur de relire aujourd'hui les formidables débats parlementaires de juillet et décembre 1885, lors du vote de crédits pour la poursuite de la conquête de Madagascar et de l'Indochine. L'historien Gilles Manceron en propose ici une sélection raisonnée, assortie d'une préface les remettant en perspective. Quand Jules Ferry défend l'idée d'une " colonisation républicaine " au nom du droit des " races supérieures vis-à-vis des races inférieures ", Jules Maigne, un vieux républicain de 1848, lui réplique : " Vous osez dire cela dans le pays où ont été proclamés les droits de l'homme ! ". Et Georges Clemenceau : " Je ne comprends pas que nous n'ayons pas été unanimes ici à nous lever d'un seul bond pour protester violemment contre vos paroles ! "
Le " parti colonial " a tout fait ensuite pour faire oublier ce débat fondamental de 1885. C'est sur cette occultation qu'a pu se développer pendant trois quarts de siècle une politique coloniale républicaine faisant fi des droits de l'homme – et dont l'héritage fait retour aujourd'hui
Gilles Manceron, historien, est vice-président de la Ligue des droits de l'homme. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont avec Hassan Remaoun, D'une rive à l'autre. La guerre d'Algérie de la mémoire à l'histoire ( avec Hassan Remaoun, Syros, 1993) et Marianne et les colonies. Une introduction à l'histoire coloniale de la France (La Découverte, 2003).
" L'ouvrage que propose Gilles Manceron, historien réputé de la question, vice-président de la Ligue des droits de l'homme, a le mérite de nous ramener à une année clé: 1885, à partir de laquelle se nouent toutes les contradictions. L'auteur présente de très longs extraits de neuf séances parlementaires. [...] Mais ce livre permet également de rappeler que l'esprit colonial n'était pas inné, qu'il a, comme tout phénomène historique, une histoire. Gilles Manceron rappelle qu'il y eut une opposition active à la politique d'expansion, illustrée par les protestations venant de la gauche (où s'illustrait alors Clemenceau) mais aussi d'une forte partie de la droite. [...] L'auteur conclut par des réflexions que nous partageons, d'immédiate actualité. La période coloniale, finalement, n'aura été qu'une parenthèse relativement brève. mais l'esprit colonial, lui, est toujours présent. "
L'HUMANITÉ
" Au coeur de la polèmique sur les si décriées - et pas toujours avec la rigueur requise - "lois mémorielles", voici un ouvrage volcanique, propre à nourrir la réflexion comme à relancer la controverse sur la colonisation. Car il nous rappelle que ce débat a déjà eu lieu, à l'heure où l'Empire français d'outre-mer s'ébauchait sous l'impulsion de certains courants de la IIIème République. Louable est l'initiative de Gilles Manceron de publier les débats parlementaires de 1885 relatives à la poursuite de Madagascar et la relance de la conquête de l'Indochine. "
HISTOFORUM
" A l'intérieur du champs républicain, jamais le clivage n'apparut aussi clairement que pendant les débats sur la politique coloniale organisés à la Chambre des députés en 1885. C'est à l'occasion de ces débats, réédités dans ce petit volume, qu'eurent lieu certaines des passes d'armes les plus célèbres entre Jules Ferry, farouche partisan des conquêtes outre-mer, et Georges Clemenceau, qui s'enflamma contre "le gouvernement français exerçant son droit sur les races inférieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force aux bienfaits de la civilisation. "
LE MONDE DES LIVRES
" Dan ce petit ouvrage, Gilles Manceron revient sur les deux débats parlementaires de juillet et décembre 1885 au cours desquels des députés français se sont interrogés sur la légitimité d'une politique d'expansion coloniale, la première fois à propos des opérations à Madagascar et la seconde au sujet de l'Indochine. Il nous livre de très larges extraits, tirés du Journal officiel de la République française, et éclairés par un appareil de notes léger, une chronologie de l'histoire coloniale française, et une bibliographie indicative. On y retrouve des discours célèbres, notamment celui dans lequel Jules Ferry exposa l'ensemble des raisons qui justifiaient à ses yeux l'expansion coloniale, ainsi que la réplique cinglante de Clemenceau, qui dénonça "le gouvernement français exerçant son droit sur les races inférieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force aux bienfaits de la civilisation". Mais le mérite de ce recueil est aussi de reproduire les interventions des orateurs de second rang, qui ne sont pas moins dignes d'intérêt. "
L'OURS
2024-12-11 - PRESSE
Introduction
1885, une année charnière du basculement de la " République coloniale ", par Gilles Manceron
Les deux grands débats parlementaires de 1885 et la conférence de Berlin
Pas de droits de l'homme pour les Noirs ! " Ce n'est pas le droit, c'en est la négation ! "
Un débat serré au cœur de la République. Un débat prémonitoire
Le terrible " engrenage " de la colonisation
Politique monarchique ou républicaine ?
I. Pour ou contre la guerre sans nom à Madagascar ?
Débat parlementaire du 25 au 30 juillet 1885
Séance du samedi 25 juillet 1885
Séance du lundi 27 juillet 1885
Séance du mardi 28 juillet 1885
Séance du jeudi 30 juillet 1885
II. La France va-t-elle vers des drames en Indochine ?
Débat parlementaire du 17 au 24 décembre 1885
Séance du jeudi 17 décembre 1885
Séance du lundi 21 décembre 1885
Séance du mardi 22 décembre 1885
Séance du mercredi 23 décembre 1885
Séance du jeudi 24 décembre 1885
La République française et la question coloniale : quelques dates clés (1792-1962)
Bibliographie indicative sur l'histoire coloniale de la France.