" L'environnement " et ses " problèmes " sont devenus un enjeu d'une telle force d'évidence qu'il paraît presque impossible d'apporter la contradiction à ce projet : " il faut protéger l'environnement ! " C'est précisément cet ordre, au double sens de commandement et d'idéal d'organisation, qu'interroge ce livre profond et informé. L'auteur soutient brillamment le paradoxe suivant : au départ, les revendications écologiques étaient profondément critiques des savoirs scientifiques et techniques et du développement social qu'ils conduisent. Trente ans plus tard, leur traduction en politiques d'environnement débouche au contraire sur un appel croissant aux experts, ingénieurs et techniciens, détenteurs véritables d'un éco-pouvoir montant. La rationalité scientifique et technique, longtemps cible privilégiée de l'opprobre écologique, se prétend désormais au service de la dépollution et de la sauvegarde des milieux naturels. Notre capacité collective à débattre de ces questions demeure en revanche très faible. Les médias, qui donnent trop souvent une représentation naturaliste naïve du monde, ont leur part de responsabilité dans cette situation, et l'auteur en fait une critique sans cession. Mais il analyse aussi avec précision le jeu de l'administration publique dans la gestion des nuisances par débats contradictoires. Il passe enfin au crible le rôle des associations de défense, qui s'exténuent dans des mobilisations et des contre-expertises sans moyens suffisants. Avec le concept d' "éco-pouvoir ", Pierre Lascoumes dévoile l'émergence d'une nouvelle rationalité, qui prétend prendre le contrôle de tous les systèmes vivants, avec les effets de normalisation qui en découlent.
Introduction - L'environnement, çà n'existe pas - Les politiques de protection de l'environnement existent-elles davantage ? - transcodage des politiques publiques et problèmes de recyclage -
I. Au spectacle de la nature -
1. La force du naturalisme naïf - Sous un consensus apparent, des images éclatées - Des relations subjectives au monde -
2. Les récits d'environnement, un pattchwork mal cousu - L'environnement, d'abord des faits divers naturalistes - Trois scénarios pour informer sur l'environnement -
II. Administrer les pollutions -
3. La gestion publique de l'environnement - Des politiques de compromis non résolus - Des politiques d'organisation -
4. La formalisation juridique du risque industriel - Nouveaux risques ou nouvelles visibilités ? - Déplacements dans les intérêts protégés -
5. La gestion technocratique des risques industriels - Les Mines, ou la diversification réussie du rôle des ingénieurs d'État - Une magistrature technique, ou presque - Un transcodage juridico-technique -
6. La gestion conventionnelle des pollutions et des risques - Une politique contractuelle évolutive - Techniques assurantielles et prévention des pollutions -
III. Les associations de défense de l'environnement -
7. Les ssociations au risque de la démocratie participative - Les associations, milieu de soutien ou groupes à tout faire ? - La participation associative, supplétive ou constructive ? - Une contradiction à gérer -
8. Formes et conditions de l'action collective - Intérêt défendu et structuration interne des associations - Les réseaux associatifs et leurs effets - problèmes et lignes d'évolution actuels -
Conclusion - Les machines à la Tinguely des politiques publiques et leurs états de "catastrophe" - La mort annoncée d'un ministère ? Politique ou programmes d'environnement ? - Négociations et transformations incrémentales des politiques publiques - Nouvelles ruses de la technique et éco-pouvoir.