L'alimentation au travail depuis le milieu du XIXe siècle

L'alimentation au travail depuis le milieu du XIXe siècle

Depuis une vingtaine d'années, l'histoire de l'alimentation et des pratiques alimentaires s'est développée et a fait l'objet de nombreux travaux, tant en histoire que dans d'autres sciences sociales. Ce numéro spécial interroge plus spécifiquement les formes et les enjeux de l'alimentation au travail dans les sociétés industrielles entre le milieu du XIXe siècle et les années 1980. Il entend montrer comment les pratiques alimentaires contribuent à structurer le temps social, mais aussi pourquoi elles constituent des observatoires privilégiés pour saisir les visées hygiénistes, les dispositifs d'autorité dans l'entreprise, les habitudes individuelles et collectives des travailleurs et les sociabilités qu'ils cultivent.
Sont ici réunies sept études de cas représentant un éventail de sociétés industrielles (France, Italie, Royaume-Uni, URSS). Les auteurs se proposent d'abord d'expliquer la mise en place d'une alimentation " encadrée " par le patronat et sa chronologie. La première moitié du XXe siècle, de 1914 à l'entre-deux-guerres, est à cet égard décisive.
Le deuxième objectif est d'éclairer les marges de manoeuvre des acteurs, la diversité des formes de sociabilité alimentaire et leur rôle dans la construction d'une culture ouvrière comme dans l'instauration, l'affirmation et le maintien des liens sociaux au travail.
Une troisième série d'interrogations porte sur les discours relatifs à l'alimentation populaire et sur ce qu'ils dévoilent de l'ordre social et politique, du licite et de l'illicite, du rapport de l'ouvrier à son corps, de sa recherche du plaisir et des interactions genrées sur le lieu de travail. Le contenu de l'assiette n'a pas été oublié : de l'éloge de la viande à celui de l'alimentation saine et diététique intégrant les fruits et légumes, autant de préoccupations qui évoluent dans une dialectique incessante entre acculturation et résistance.

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Détails techniques
Collection : Revue Le Mouvement social n°247
Parution : 26/06/2014
ISBN : 9782707181954
Nb de pages : 192
Dimensions : 155.0 * 235.0 cm

Extraits presse

Et si le réfectoire d'ouvriers et le restaurant d'entreprise étaient le reflet de dispositifs de commandement managérial et de stratégies de résistance des salariés ? C'est ce que montrent les auteurs regroupés par l'historien Stéphane Gacon pour offrir une histoire sociale de l'alimentation au travers de sept cas (en France, en Italie, au Royaume-Uni et en ex-URSS). Des analyses éclairantes sur la manière dont les entrepreneurs, par souci paternaliste ou non, ont incité les ouvriers, dès la fin du XIXe siècle, à ne plus manger chez eux mais sur leur lieu de travail dans une logique productiviste et hygiéniste. Avec cette question qui reste en suspens : les logiques de surinvestissement au travail ne conduiraient-elles pas aujourd'hui à "une atomisation des pratiques alimentaires et donc à la mort de la cantine, lieu de sociabilité, où se confortaient, malgré tout, un certain nombre de collectifs ?" C'est en partie ce que révèle la sociologue Marie-Line Jamard, qui a passé les pauses déjeuner de EDF-GDF au crible. En marge de la cantine, les employés prennent aussi leur repas seuls dans les bureaux. Une façon de se désengager.

2014-10-01 - Sandrine Foulon - Alternatives économiques

 

Table des matières


Cantines et alimentation au travail : une approche comparée, par Stéphane Gacon
Les trois âges du paternalisme. Cantines et alimentation ouvrière au Creusot (1860-1960), par Stéphane Gacon et François Jarrige
La restauration collective des ouvriers en France pendant la Grande Guerre, par Xavier Vigna
Cantines d'entreprise et discours hygiénistes dans l'industrie britannique de l'entre-deux-guerres, par Vicky Long
Nourrir les constructeurs du socialisme. Cantines et question alimentaire dans l'URSS des premiers plans quinquennaux (1928-1935), par François-Xavier Nérard
La cantine au prisme du paternalisme industriel. Alimentation et consentement à l'usine de Dalmine (Lombardie) entre fascisme et république, par Ferrucio Ricciardi
La gamelle ou la cantine ? Formes et enjeux de la restauration dans les témoignages écrits ouvriers depuis 1945, par Éliane Le Port
La cantine à l'ère des " réformes ". Le repas du midi dans une grande entreprise publique en France dans les années 1990, par Marie-Line Jamard
Notes de lecture
À table ! – La table des pauvres. Cuisiner dans les villes et cités industrielles, 1780-1950, de M. Bonneau, par F. Jarrige
La politique au prisme municipal. – Clochemerle ou république villageoise ? La conduite municipale des affaires villageoises en Europe XVIIIe-XXe siècle
, de L. Brassart et al., par C. Gaboriaux
Une autre histoire du socialisme. Les politiques à l'épreuve du terrain (1919-2010),
de A. Chamouard, par F. Conord
La classe ouvrière aujourd'hui : mouvements sociaux et conditions de travail. – Les damnées de la caisse. Grève dans un hypermarché
, de M. Benquet, par S. Pattieu
Ouvriers malgré tout. Enquête sur les ateliers de maintenance des trains de la Régie autonome des transports parisiens
, de M. Thibault, par C. Chevandier
Paroles de syndicalistes à Marseille. Le mouvement social contre la réforme des retraites
(automne 2010), de C. Excoffier et al., par M. Pigenet
Mouvements ouvriers et crise industrielle dans les régions de l'Ouest atlantique des années 1960 à nos jours, dir. par L. Jalabert et C. Patillo, par J.-C. Fichou
Histoire des entreprises : regards comparés. – Iron Will: Cleveland-Cliffs and the Mining of Iron Ore, 1847-2006, de T. S. Reynolds et V. P. Dawson, par P. Raggi
PME et grandes entreprises en Europe du Nord-Ouest XIXe-XXe siècle. Activités, stratégies, performances
, de J.-F. Eck et M.-P. Chelini, par J.-L. Mastin
Nouvelles approches de la Seconde Guerre mondiale. – Ruling Oneself Out. A Theory of Collective Abdications
, d'I. Ermakoff, par N. Patin
Pour une microhistoire de la Shoah, par C. Zalc et al., par A. Kichelewski
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